Thales booste ses systèmes civils et militaires à l'IA (Philippe Keryer, Thalès)

INTERVIEW

Philippe Keryer, directeur stratégie, recherche et technologies

Quels sont les bénéfices de l'IA pour Thalès ?

Philippe Keryer : L'IA est devenue un outil indispensable pour faire face au déluge de données issues de nos capteurs et systèmes numériques toujours plus performants. Seule l'IA permet désormais d'analyser et exploiter en temps réel ces torrents d'informations, dépassant les capacités humaines. Elle révolutionne la prise de décision sur les théâtres d'opération comme dans la gestion du trafic aérien. Par exemple, à bord des avions de chasse Rafale, l'IA analyse en quelques millisecondes les images des pods optroniques pour alerter les pilotes sur les zones d'intérêt. C'est la raison pour laquelle Thales vient de créer un lab didié à l'IA, baptisé "CortAIx".

Vous insistez sur le fait que Thales développe une "IA spécifique". Qu'entendez-vous par là ?

Nos systèmes étant critiques, de la défense au contrôle aérien civil, notre IA doit répondre à des exigences de transparence, d'explicabilité et bien sûr de cybersécurité maximales. Nous couplons l'IA aux données avec des moteurs experts basés sur des règles formelles. Cela permet de garantir la compréhension du raisonnement de l'IA et sa certification. C'est ce que nous faisons par exemple avec les séquenceurs d'atterrissage proposés aux contrôleurs aériens, réinjectés dans les calculs formels pour vérification.

Quels développements futurs espérez-vous ?

Un défi clé sera d'embarquer des IA certifiées dans les aéronefs civils, après les avoir qualifiées selon les exigences draconniennes du secteur. Nos travaux vont dans ce sens avec les autorités de régulation comme l'AESA en Europe. Mais les progrès en physique quantique promettent aussi des capteurs d'une précision inouïe, peut-être 1000 fois supérieure, qui requerront encore des avancées majeures en matière de traitement des données par l'IA.